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samedi 1 février 2014

Parce que j'ai pêché & Le problème avec Charley - Darynda Jones


http://lachroniquedespassions.blogspot.fr/2013/12/parce-que-jai-peche-le-probleme-avec.html




 Le problème avec Charley, 
c'est qu'elle a volé mon cœur la première fois que je l'ai vue, 
il y a plusieurs siècles.










Les deux très courtes nouvelles sont extraites de l'anthologie Les amants des ténèbres aux éditions Milady.
La narratrice de la première nouvelle n'est plus Charley comme d’ordinaire mais une de ses « clientes »décédées. Alors rien de génial au niveau de l'histoire mais le clin d’œil est vraiment sympa et la verve de Darynda Jones fait toujours mouche.
La deuxième nouvelle est extrêmement courte et là AU SECOURS ! Le narrateur n'est autre que Reyes. Pour moi qui adore ce personnage c'était Noël avant l'heure !
Bien sûre c'est l'extrait que j'ai choisi.
L'anthologie propose aussi des scènes coupées ? Je vous mets un court extrait d'un scène que j'ai particulièrement apprécié
Bonne dégustation !



La vie en liberté, loin des barreaux coulissants et de la monotonie qu'amène la routine, est si bizarre, si étrangère que je suis persuadé d'être entré dans un autre monde. Dans une autre galaxie. Ils m'avaient dit que ça se passerait comme ça. Ceux qui m'ont emprisonné. Ils se sont rendu compte de leur erreur, dix ans après les faits, et m'ont relâché, mais qu'ils aillent se faire foutre. Dix ans, c'est une longue peine à purger pour quelque chose que je n'avais pas fait. Avant que je sorte, ils m'ont averti que, vu mon jeune âge lors de mon incarcération, je ne saurais pas naviguer dans le monde réel. Les activités de tous les jours, comme régler les factures et faire les courses, seraient de vrais défis. Sauf que je n'ai besoin de rien. Etre le fils de l'ennemi public numéro un a ses avantages. Je peux subsister en ayant uniquement de l'eau pendant des mois. Je pourrais déménager en Antarctique et m'en tirer sans manteau si j'en avais envie.

Mais bon, elle ne se trouve pas en Antarctique. Et survivre dans le vrai monde pourrait également se révéler un plus grand défi que je ne l'avais pensé à la base. Je prends une douche dans un petit hôtel miteux. Quand je m'enroule dans une serviette de bain, j'aperçois mon reflet dans le miroir fendu au-dessus du lavabo et étudie les écorchures d'un rouge foncé qui s'étendent de mon épaule droite à ma hanche et recouvrent mon torse. Les entailles m'ont été gracieusement offertes par un démon échappé de l'enfer. Il n'a rien trouvé d'autre que sa propre mort, ici sur Terre, cependant la bataille pour l'éliminer a été plus compliquée que ce à quoi je m'attendais. Les blessures seront guéries dans quelques jours, mais je n'ai pas envie qu'elle les voie. Ni celle-ci ni les autres. Je suis déjà un monstre, pas besoin d'ajouter le fait que je suis défiguré à mon C.V.
Je regarde mes tatouages, ces motifs complexes faits de lignes et de courbes. Un trait pris à part n'est rien d'autre qu'une marque noire sur ma peau, mais toutes ces rayures réunies forment une carte, une clé pour les portes de l'enfer - un cadeau de mon père - et, si je les observe assez longtemps, je serai aspiré. Dans la mesure où je viens d'être libéré d'une prison terrestre, la dernière chose dont j'ai besoin est de retourner dans celle qui se trouve au royaume des ténèbres. Et je ne pense pas que je serai assez fort pour m'échapper de cet endroit une nouvelle fois. Je tourne la tête. Je relève le menton. J'étudie mon visage. Mes yeux sont bruns. Je ne leur ai jamais rien trouvé de spécial, mais d'autres, hommes comme femmes, semblent les trouver particulièrement attirants, donc j'essaie de ne pas établir de contact visuel quand je suis à l'extérieur. Mais malgré ça, leurs regards décidés, leur incapacité à se détourner, à respirer, est déconcertante, alors je les aveugle. Juste quelques secondes. Juste le temps de les dépasser. Ensuite, leurs yeux sont scotchés à mon dos. Chauds. Pleins de convoitise. Me suppliant de m'arrêter. De me retourner.
Je ne le fais jamais.
J'arrête de reluquer ma forme humaine, si différente de ma forme inhumaine, et quitte mon corps physique, me disant que je vais simplement vérifier comment elle se porte. M'assurer qu'elle est en sécurité. D'autres de mes anciens camarades errent là-dehors et il n'y a rien dont ils aient plus envie que d'elle. Que de ce qu'elle est. Un portail. Un passage qui mène droit au paradis.
Je progresse au-dessus des rues d'Albuquerque, heureux que personne ne puisse me voir. Comme ça, personne ne peut me désirer plus ardemment que sa prochaine bouffée d'oxygène. Leur faim est exténuante. Leur déception lorsque je les ignore palpable.
Je traverse les murs de son appartement et sens son pouls s'accélérer. Elle sait que je suis là. Comme je ne me suis pas encore matérialisé, elle ne peut pas me voir. C'est une bonne chose, étant donné ce à quoi je ressemble en ce moment. Elle est debout devant son lavabo, entourée d'une serviette de bain. Ses longues jambes s'en échappent comme une cascade de péché. Le tissu épouse sa taille, m'offrant un aperçu de ses formes généreuses. Ses cheveux retombent le long de son dos en sombres mèches alourdies par l'eau. Elle détache son regard doré du mur à côté d'elle et balaie une de ses fines épaules avant de le porter sur moi. Mais elle l'ignore, aussi continue-t-elle à étudier les environs.
Je ne peux m'en empêcher. Je m'approche d'elle et caresse sa bouche de la mienne. J'ai le souffle coupé quand elle sort sa langue pour s'humidifier les lèvres, lorsque ses doigts touchent ce bouton de rose, le testant, l'explorant. Elle se mord la lèvre inférieure. Croise les bras dans cette posture provocatrice qu'elle aime adopter dès que je suis près d'elle.
— Tu peux te montrer, tu sais.
Sa voix caresse ma peau comme un vent rauque.
Elle hausse un sourcil et continue à observer les alentours. Attendant. Faisant semblant de ne pas espérer. Mais j'entends le sang battre plus fort dans ses veines, ressens l'inondation de chaleur entre ses cuisses. Son expression est plutôt agacée, mais son corps témoigne du contraire. C'est une trahison digne d'une tragédie grecque.
— Je suis toujours en colère contre toi, ajoute-t-elle.
Elle s'appuie contre le lavabo, et je ne peux m'empêcher de me coller à elle. Elle laisse échapper un hoquet de surprise et essaie de me repousser, mais, pour elle, je ne suis rien de plus que de l'air brûlant et épais. Je pourrais me matérialiser, mais je ne le ferai pas. Pas maintenant. Quand je serai guéri,si je guéris. Si j'en ai l'occasion. Il reste des démons, et ils la veulent. Ils veulent la magnifique créature qui se tient devant moi. Elle attrape les coins du lavabo et se délecte de la chaleur dans laquelle je l'ai enveloppée. Elle penche la tête en arrière et je me penche pour embrasser son cou. Elle gémit faiblement, m'encourageant, m'incitant à me matérialiser pour m'enfouir en elle jusqu'à en oublier mon nom.
Non. Pas maintenant. Pas comme ça. Je serre les dents et recule. La fraîcheur instantanée lui provoque la chair de poule. Elle s'entoure de ses bras et frotte sa peau radieuse, puis fronce les sourcils.
Lorsqu'elle reprend la parole, sa voix a changé. Elle est plus douce, moins assurée, et la douleur qui émane de sa poitrine me fait regretter d'être passé.
Tu as trouvé ce pour quoi tu étais venu ? Tu as obtenu la réaction que tu voulais ?
Dans la mesure où sa réaction n'était pas de crier de plaisir pendant qu'elle jouissait, frissonnante dans mes bras, non. Une prochaine fois, peut-être.
Le problème avec Charley, c'est qu'elle a volé mon cœur la première fois que je l'ai vue, il y a plusieurs siècles. Son sourire étincelait comme une étoile contre la soie de l'éternité. Tout l'univers glissait dans sa direction, comme si chaque planète et chaque astre ne désirait rien plus que de s'approcher d'elle. Je savais exactement ce qu'elles ressentaient. Je comprenais les profondeurs de sa force d'attraction bien avant qu'elle ne naisse sur cette Terre. Dans ce monde. Un monde qui la méritait presque aussi peu que moi.
Et elle est là, devant moi. Le menton relevé. Ses yeux comme deux immenses lacs d'or liquide.
— Maintenant que tu as accompli ta mission, ça te dérangerait de foutre le camp ? J'ai une affaire à résoudre.
Elle se retourne en direction de son miroir et commence à se brosser les cheveux. Je me demande si elle découvrira un jour qui est son vrai père. À quel point ses ancêtres sont fabuleux. Chaque Faucheuse a une famille, mais la sienne est une authentique famille royale. C'est une princesse parmi les voleurs.
Non, elle mérite bien mieux qu'un type comme moi.
Je m'en vais. Réinvestis mon corps. Prends une profonde inspiration tandis que je songe aux démons qui sont entrés dans cette dimension pour s'en prendre à elle. Et, avec une énergie renouvelée, je pars chasser.




A la base, l'histoire devait se poursuivre dans le deuxième tome à partir de ce moment, mais je voulais une fin plus heureuse et sans effet de cliffhanger total. Curieusement, mon agent était du même avis.
Contexte : Charley est sur le point de se précipiter à Santa Fe pour s'assurer que l'injonction contre l'Etat pour retirer Reyes de l'assistance respiratoire était bien passée.

Après avoir enfilé un sweat à capuche sombre et ramené mes cheveux en queue-de-cheval, je me précipitai au bureau, là où se trouvaient tous les numéros liés à l'affaire, que j'avais notés sur des Post-it de toutes les couleurs. Je commençai par appeler Neil Gossett à la prison, mais il était absent. J'essayai ensuite l'établissement de soins prolongés, mais la réceptionniste me dit qu'elle ne pouvait pas transmettre les données personnelles des patients par téléphone. J'appelai alors oncle Bob, mais il était au tribunal. Je continuai avec l'assistante du juge chez qui j'avais demandé le mandat d'injonction, mais elle me répondit que la requête était partie à la cour de justice de Santa Fe.
N'ayant plus d'autre choix, je décidai de m'y rendre. La panique me gagnait. Et si l'injonction n'était pas passée ? Que se passerait-il si le juge avait refusé la requête ?
En traversant le parking en direction de Misery, je pris conscience que j'avais oublié mes clés chez moi. Je croisai Cookie dans l'escalier, et je lui appris où je comptais aller. Elle marmonna quelque chose au sujet d'une augmentation qu'elle aurait méritée, mais je la dépassai et fonçai vers mon appartement.
Je m'arrêtai net en découvrant Reyes. Il se tenait devant la fenêtre et regardait au travers comme précédemment. Normalement, je sentais tout de suite quand un défunt était dans les parages, mais c'était différent avec lui. J'étais incapable de dire s'il était mort ou non. Son teint n'avait pas changé, il était riche et vibrant. L'avaient-ils débranché des appareils respiratoires ? Si je le touchais, serait-il chaud ou froid ? Si son corps physique mourait, j'ignorais s'il serait toujours Reyes, ou s'il deviendrait comme n'importe quel autre défunt, glacé et légèrement monochrome.
Il ne se retourna pas lorsque je passai la porte. Je la refermai doucement et m'avançai vers lui. Plus je m'approchais, plus il semblait réel. Il portait une chemise que je n'avais encore jamais vue, un jean et des boots. Le rythme de sa respiration était constant, contrôlé. Je remarquai à cet instant qu'il était un peu plus pâle que d'habitude, ce qui me rendit malade d'inquiétude. Se pouvait-il qu'il soit vraiment mort ?
Lorsque je fis un autre pas en avant, je compris que quelque chose n'allait pas. Un film de transpiration recouvrait sa nuque. Tandis que je contournais le canapé et m'approchais, je vis que l'avant de sa chemise était imbibé de sang qui dégoulinait le long de la jambe de son pantalon. Puis je me focalisai sur une de ses mains, sur le couteau géant qu'il tenait, et je m'immobilisai aussitôt.
Incapable de détacher mon regard de l'arme, je remarquai dans ma vision périphérique que Reyes se tournait vers moi. Je pris mes jambes à mon cou.
Je courus vers la porte d'entrée. Je n'avais pas fait trois pas que Reyes était déjà sur moi. Il me plaqua contre le mur et, avant que j'aie le temps de réagir, la lame se trouva sous ma gorge. Il s'immobilisa. Un calme incroyable m'enveloppa, me donnant la possibilité de réfléchir avec une clarté absolue. Est-ce que ça allait vraiment se terminer comme ça ? Etait-ce réellement la fin ?
Reyes avait passé une main autour de mon cou, verrouillant mon dos à son torse, et la seconde tenait le couteau. Je connaissais plein de tactiques d'autodéfense créées spécialement pour ce type de situation, mais je savais également à quel point Reyes était fort et incroyablement rapide. Cependant, il était humain, à présent. Il était réel et solide, et il ne se trouvait pas dans un hôpital à une heure de route. S'était-il échappé ? Était-ce comme ça qu'il avait été blessé ?
Il me retint un moment afin de s'assurer que je n'essayerais pas de m'enfuir.
— Je suis désolé d'avoir à faire ça.
Je sursautai en sentant la pointe acérée du couteau déchirer ma peau, la morsure envahissante du métal. Wow. Ça allait craindre à mort. Reyes m'avait expliqué que je serais en mesure de lui échapper si je savais ce dont j'étais capable. Je l'ignorais de toute évidence, puisque je ne voyais pas comment me sortir de ce pétrin. Je ruai contre son dos, mais il tint bon.
— Arrête de te débattre, dit-il de manière agacée.
— Arrête de me trancher la gorge, contrai-je, les dents serrées.
— Je ne suis pas en train de le faire. Tu gigotes. Ça ne se produirait pas si tu te tenais tranquille.
— C'est toi qui as un couteau.
Il grogna, me retourna afin que je me retrouve face à lui, puis enroula une main autour de mon cou, me plaquant de nouveau contre le mur. La lame était toujours dangereusement proche de ma jugulaire.
— Il faut qu'on parte, dit-il, à moitié plié par la douleur.
Je combattis mon instinct premier, qui me dictait de tendre le bras vers lui, de lui offrir mon soutien. J'en avais fini d'aider les gens. Le monde pouvait bien aller se faire voir, en ce qui me concernait.
— Je n'irai nulle part avec toi, lançai-je, la colère rendant ma voix tranchante. Toi et moi, c'est terminé.
Tout en m'adressant un sourire désagréablement malicieux, il se pencha jusqu'à ce que nos visages ne soient plus qu'à quelques centimètres l'un de l'autre, jusqu'à ce que nos respirations se mélangent dans l'air épais et tendu, puis demanda :
— Pourquoi tu crois que j'ai apporté le couteau ?
La rage prit possession de moi, me ramenant à la réalité.
— Tu vas me forcer la main ? Pourquoi ?
II plongea son regard dans le mien. Ses pupilles acajou étaient encore plus brillantes qu'auparavant, les paillettes vertes et or étincelant sous un voile de douleur. Puis il baissa les cils et répondit :
— Parce qu'ils t'ont retrouvée.


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