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vendredi 7 février 2014

Beautiful Disaster de Jamie McGuire


 
Éditeur : J'ai lu
Sortie : 22 janvier 2014
384 pages



—    Tu sais pourquoi c’est toi que je veux ? J’ignorais que j’étais perdu jusqu’à ce que tu me trouves. J’ignorais que j’étais seul avant la première nuit que nous avons passée tous les deux dans mon lit. Avec toi, j’ai tout juste. Tu es celle que j’attendais, Poulette.




La nouvelle Abby Abernathy est une bonne fille. Elle ne boit pas, ne jure pas,
et elle possède le pourcentage approprié de cardigans dans son armoire. Abby est persuadée d’avoir mis suffisamment de distance entre elle et son passé, mais lorsqu’elle arrive à l’université avec sa meilleure amie America, le chemin vers un nouveau départ est rapidement mis à mal par « l’homme aux liaisons sans lendemain » de l’université.
Travis Maddox est exactement ce qu’Abby a besoin d’éviter. Il passe ses nuits à gagner de l’argent avec ses poings sur le ring, et ses journées à l’université en tant qu’étudiant charmeur. Intrigué par la résistance d’Abby, Travis la prend au piège d’un simple pari, la forçant à entrer dans sa vie. S’il perd, il devra s’abstenir de toutes relations sexuelles durant un mois. Si Abby perd, elle devra vivre avec lui dans son appartement durant cette même période de temps.




Il me raccompagna jusqu’à ma porte ; je sortis mes clés, évitant son regard. Sa main se glissa soudain sous mon menton et, du pouce, il caressa mes lèvres.
—    Est-ce qu’il t’a embrassée ?
Je m’écartai, surprise par la chaleur que ses doigts venaient de provoquer en moi.
—    Tu sais vraiment t’y prendre pour bousiller une soirée formidable, toi, hein ?
—    Tu as trouvé ça formidable alors ? Ça veut dire que tu as passé un bon moment ?
—    Je passe toujours de bons moments avec toi.
Il baissa la tête, les yeux rivés sur le sol.
—    Est-ce qu’il t’a embrassée ?
—    Oui, soupirai-je, agacée.
Il ferma les yeux.
—    Et c’est tout ?
J’ouvris la porte d’un mouvement brusque.
—    Ça, ça ne te regarde pas !

Travis la referma et se mit en travers de mon chemin.
—    J’ai besoin de savoir.
—    Non tu n’as besoin de rien savoir ! Laisse-moi passer !
—    Poulette !
—    Maintenant que je ne suis plus vierge, tu penses que je vais m’envoyer en l’air avec n’importe qui ? Merci !

—    Mais j’ai pas dit ça, merde ! C’est trop demander, un peu de tranquillité d’esprit ?
—    Et en quoi cela te tranquilliserait-il de savoir si je couche ou non avec Parker ?
—    Tu sais très bien pourquoi, enfin ! C’est évident pour tout le monde sauf pour toi ! lâcha-t-il, exaspéré.
—    Ben c’est que je dois être la dernière des connes, alors. De mieux en mieux, Trav.
Il me prit par les épaules.
—    Ce que je ressens pour toi... c’est fou.
—    Fou, oui, je pense que c’est le mot, répliquai-je en me dégageant.
—    J’ai pas arrêté de repenser à tout ça ce soir, sur la moto, alors maintenant, tu vas m’écouter.
—    Travis...
—    Je sais qu'on est mal barrés, d’accord ? Je suis impulsif, je pars en vrille sans prévenir, et je t’ai dans la peau comme jamais personne auparavant. Tu agis comme si tu me détestais, et l’instant d’après, tu as besoin de moi. Je ne fais jamais ce qu’il faut comme il faut, et je ne te mérite pas... mais putain, je t’aime, Abby. Je t’aime plus que je n’ai jamais aimé qui que ce soit ou quoi que ce soit. Quand tu es près de moi, je n’ai plus besoin d’alcool, ni d’argent, ni de combats, ni de baise facile. Je n’ai plus besoin que de toi. Je ne pense qu’à toi, je ne rêve que de toi. Je ne veux que toi.
J’avais prévu de feindre l’indifférence, mais ce fut un échec total, et mémorable. Comment le regarder de haut alors qu’il venait d’abattre toutes ses cartes ? Le jour où nous nous étions rencontrés, quelque chose avait changé en chacun de nous. Ce quelque chose, sans que l’on sache ce que c’était, nous avait rendus dépendants l’un de l’autre. Pour des raisons que j’ignorais, j’étais son exception, et j’avais beau lutter contre mes sentiments, il était la mienne.
Il posa les mains sur mes joues et me regarda dans les yeux.
—    Est-ce que tu as couché avec lui ?
De chaudes larmes me montèrent aux yeux tandis que je secouais la tête négativement. Il plaqua ses lèvres sur les miennes et sa langue glissa dans ma bouche sans hésitation. Incapable de me contrôler, j’agrippai son tee-shirt et l’attirai contre moi. Il émit un grognement sourd qui me vit vibrer, et me serra si fort que j’eus du mal à respirer.
Puis il s’écarta, à bout de souffle.
—    Appelle Parker. Dis-lui que tu ne veux plus le voir. Dis-lui que tu es avec moi.
Je fermai les yeux.
—    Je ne peux pas être avec toi, Travis.
—    Mais pourquoi, bordel ?
J’avais peur de sa réaction quand il entendrait la vérité. Je me tus.

Il eut un éclat de rire.
—    Incroyable ! La seule fille que je désire ne veut pas de moi !
Je déglutis, la gorge serrée. J’allais devoir m’approcher d’une vérité que je m’étais efforcée d’ignorer ces derniers mois.
—    Quand America et moi sommes venues nous installer ici, l’objectif était de prendre un nouveau cap. En tout cas, d’en changer. Les bagarres, le jeu, l’alcool... voilà ce que j’ai laissé derrière moi. Quand je suis à tes côtés... je retrouve tout ça, dans un paquet cadeau tatoué et irrésistible. Je n’ai pas fait tout ce chemin pour revivre le même cauchemar.
Il me souleva le menton afin que je sois face à lui.
—    Je sais que tu mérites mieux que moi. Tu crois que je n’en suis pas conscient ? Mais si une femme a été faite pour moi un jour... c’est toi. Je ferai ce qu’il faudra, Poulette. Tu m’entends ? Je suis prêt à tout.
Je me détournai. J’avais honte de ne pas pouvoir lui dire toute la vérité. C’était moi qui n’étais pas à la hauteur. Moi qui ficherais tout en l’air, qui le détruirais. Un jour, il me haïrait, et imaginer le regard qu’il poserait sur moi quand il comprendrait m’était insupportable.
—    J’arrêterai les combats à la seconde où j’aurai mon diplôme. Je ne boirai plus une goutte d’alcool. Le « Ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants », je le réaliserai pour toi, Poulette. Si tu crois en moi, j’en serai capable.

—    Je ne veux pas que tu changes.
—    Alors dis-moi ce qu’il faut que je fasse. Dis-moi, et je le ferai.
Envisager une relation avec Parker n'était plus à l’ordre du jour depuis un moment, et je savais que c’était à cause des sentiments que je nourrissais pour Travis. Je réfléchis aux voies différentes que mon existence pouvait prendre en cet instant - faire confiance à Travis et me lancer dans l’inconnu, ou le repousser, et savoir exactement à quelle vie m’attendre, une vie sans lui. Dans les deux cas, la décision me terrifiait.
—    Tu peux me prêter ton téléphone ?
Travis me regarda sans comprendre, fronça les sourcils, puis le tira de sa poche et me le tendit.
—    Bien sûr.
Je composai le numéro et fermai les yeux, écoutant la sonnerie.
—    Travis ? Non mais ça va pas bien ? T’as une idée de l’heure qu’il est ? répondit Parker.
Sa voix était profonde et rauque, et je sentis mon cœur battre dans ma poitrine. Je n’avais pas imaginé qu’il saurait que j’appelais du téléphone de Travis.
Sans que je sache comment, les mots sortirent de mes lèvres tremblantes.
—    Je suis désolée d’appeler si tard... enfin, si tôt, mais ça ne pouvait pas attendre. Je... je ne viendrai pas dîner avec toi mercredi.
—    Mais il est presque 4 heures, Abby, qu’est-ce qui se passe ?
—    Je... on ne va plus se voir, en fait.
—    Ab...
—    Je suis... quasiment sûre d’être amoureuse de Travis.
Je me tus, me préparant à sa réaction. Il y eut quelques instants de silence stupéfait, puis il raccrocha.
Les yeux rivés au sol, je rendis son téléphone à Travis. En relevant timidement la tête, je lus sur son visage un mélange d’étonnement, de stupéfaction et d’adoration.
—    Il a raccroché, dis-je avec une grimace.
Il me scrutait, le regard plein d’espoir.
—    Tu m’aimes ?
—    C’est les tatouages, dis-je avec un haussement d’épaules.
Un large sourire creusa ses fossettes, il me prit dans ses bras.
—    Viens, rentre avec moi à l’appart.
—    Tout ça pour m’attirer dans ton lit ? J’ai dû te faire une sacrée impression, dis donc.
—    La seule chose que j’ai en tête, là, tout de suite, c’est te tenir dans mes bras le restant de la nuit.
—    C’est parti !






L'extrait :

En me voyant, debout, seule au milieu du salon, Travis fut réellement surpris et se figea. Megan me n carda, un reste de sourire aux lèvres.
Poulette ?
Je l’ai ! s’exclama triomphalement America en sortant de la chambre de Shepley.
Qu’est-ce que tu fais là ? interrogea Travis.
Il puait le whisky, et ma fureur submergea tout désir de feindre l’indifférence.
C’est bon de te voir redevenu toi-même, Trav, Iachai-je, vibrante de colère.
On allait partir, dit America en me prenant la main pour se diriger vers la porte.
Déjà, je sentais les larmes me piquer les yeux. Heureusement, la voiture n’était pas garée loin. Cependant, je faillis tomber en arrière quand quelque chose accrocha mon manteau. La main d’America quitta la mienne, elle fit volte-face en même temps que moi.
Travis avait attrapé un pan de mon manteau et le tenait fermement. Ses lèvres et son col de chemise étaient couverts de rouge à lèvres.
—    Où vas-tu ? demanda-t-il.
Il semblait à la fois ivre et perdu.
—    Je rentre chez moi, répondis-je en lissant mon manteau quand il le lâcha.
—    Et qu’est-ce que tu fais ici ?
J’entendis la neige crisser sous les pas d’America, qui revenait vers moi. Shepley dévala les escaliers pour venir se placer derrière Travis, fixant sa petite amie d’un regard inquiet.
—    Je suis désolée. Si j’avais su que tu serais là, je ne serais pas venue.
—    Mais tu peux passer ici quand tu veux, Poulette, Je n’ai jamais dit que je ne voulais plus te voir.
—    Je ne voudrais pas déranger... fis-je d’un ton fielleux avant de lever les yeux en direction de Megan, Bonne fin de soirée, lançai-je avant de tourner les talons.
Il m’attrapa par le bras.
—    Attends. Tu es en colère ?
—    Tu sais quoi ? rétorquai-je en me dégageant. Je ne sais même pas pourquoi je suis surprise.
Son visage s’assombrit.
—    Je sais plus quoi faire avec toi. Je sais plus quoi faire ! Tu me dis que c’est fini, je broie du noir, je pulvérise mon téléphone pour m’empêcher de t'appeler toutes les cinq minutes, je joue la comédie en faisant comme si tout allait pour le mieux afin que tu sois contente... et tu te mets en colère ? Mais tu m’as brisé le cœur, putain !
Ses derniers mots résonnèrent dans la nuit.
—    Travis, tu es saoul. Laisse Abby rentrer chez elle, conseilla Shepley.
Mais Travis m’agrippa par les épaules.
—    Tu veux de moi, oui ou non ? Tu peux pas continuer à me traiter comme ça !
—    Je ne suis pas venue pour te voir, dis-je simplement.
—    Je n’ai pas envie d’elle, lâcha-t-il en me fixant intensément. Mais je suis tellement malheureux...
Son regard brillait, il pencha la tête pour m’embrasser.
Je le repoussai, dégoûtée.
—    Tu as encore son rouge à lèvres sur la bouche, Travis.
Il recula, sortit un pan de sa chemise et s'essuya. En voyant les traînées de rouge sur le tissu blanc, il secoua la tête.
Je voulais juste oublier. Juste un soir, putain.
D'un revers de main, j’essuyai une larme.
Alors ne te prive surtout pas pour moi.
Une nouvelle fois, alors que je tentais de monter dans la Honda, il m’attrapa par le bras. Soudain, America se rua sur lui et le roua de coups. Il la regarda, d'abord interdit, puis stupéfait. Elle frappa jusqu’à ce qu'il me libère.
Laisse-la tranquille, enfoiré !


L'extrait :
Travis m’attrapa un poignet, puis l’autre. Je me penchai pour le mordre. Il ferma les yeux, laissa échapper un grognement sourd quand mes dents percèrent sa peau.
—    Tu peux tenter ce que tu veux, Poulette, j’en ai marre de tes conneries.
Je lâchai prise mais continuai à me débattre.
—    Mes conneries ?!? Laisse-moi descendre de cette putain de voiture !
Il approcha mes mains de son visage.
—    Je t’aime, bordel ! Tu n’iras nulle part tant que tu n'auras pas cuvé ta bière et qu’on n’aura pas discuté de tout ça !
—    Mais t’es le seul qui n’a pas encore compris !
Il me lâcha enfin, et je croisai les bras. Le reste du trajet se fit dans un silence absolu.
Quand Donnie s’arrêta, je me penchai vers lui.
—    Tu veux bien me reconduire chez moi, Donnie ?
Travis m’attrapa par un bras et me tira dehors, claqua la portière et me hissa à nouveau sur son épaule.
—    Bonne nuit, Donnie ! lança-t-il avant d’entrer dans l’immeuble.
—    Je vais appeler ton père ! menaçai-je en désespoir de cause.
Il éclata de rire.
—    Il me donnera une petite tape sur l’épaule et me dira que j’en ai mis, du temps !
Il eut du mal à ouvrir la porte, je me débattais trop.
—    Arrête un peu, on va jamais y arriver sinon.
Dans l’appartement, il alla tout droit dans la
chambre de Shepley.
—    LÂ-CHE-MOI ! hurlai-je.
—    Très bien, dit-il en me jetant sur le lit. Dors, cuve, on parlera demain.
Entre l’obscurité, la bière et la colère, je n’y voyais vraiment pas grand-chose. Je cherchais une lampe à tâtons quand Travis alluma le plafonnier. Son sourire satisfait acheva de me mettre hors de moi.
—    Je t’interdis de me dire ce que je dois faire ! criai-je en tapant du poing sur le matelas. Je ne suis pas à toi, Travis !
Dans la seconde qu’il lui fallut pour se retourner, le sourire laissa la place à la fureur. Il se rua vers moi, posa les mains à plat sur le lit et me fit face. Nos deux visages se touchaient presque.
—    MAIS MOI, JE T’APPARTIENS !



L'extrait :
—    Dis donc, t’es toujours aussi soupe au lait, ou est-ce que ça se calmera quand t’auras compris que je ne cherche pas à me glisser dans ta petite culotte ?
Il posa les mains sur mes épaules, et je sentis ses pouces caresser ma peau.
—    Je ne suis pas soupe au lait.
Il se pencha, et murmura à mon oreille :
—    Je ne veux pas coucher avec toi, Poulette. Tu me plais trop.






L'extrait :

Poulette ?
Je fis un bond. Travis apparut, mal rasé, livide.
Merde, Travis ! Tu m’as fait peur !
Si tu répondais au téléphone quand je t’appelle, je serais pas obligé de me cacher dans la pénombre.
T’as une de ces têtes...
J’ai eu une semaine difficile...
Heu... en fait, j’allais manger, là. Je t’appelle plus tard, d’accord ?
Non. Il faut qu’on parle.
Trav...
J’ai dit non à Benny. Je l’ai appelé mercredi et j'ai refusé.
Il y avait une lueur d’espoir dans son regard, qui disparut devant ma réaction.
Je ne sais pas quoi te dire, Travis.
Dis juste que tu me pardonnes. Que tu veux bien de moi à nouveau.
Je serrai les dents, m’interdisant de pleurer.
Je ne peux pas.
Le visage de Travis se décomposa. J’en profitai pour le contourner et continuer mon chemin, mais il me rattrapa et se planta face à moi.
—    Je ne mange plus. Je ne dors plus. Je suis incapable de me concentrer sur quoi que ce soit. Je sais que tu m’aimes. Tout sera comme avant, si tu acceptes de recommencer.
Je fermai les yeux.
Toi et moi... ça ne peut pas fonctionner, Travis. Plus que toute autre chose, tu es obsédé par l’idée de me posséder.
—    C’est faux. Je t’aime plus que ma vie, Poulette, dit-il, visiblement blessé.
—    Voilà où je veux en venir. Tes propos n’ont pas de sens.
—    Mais si, ils en ont un. C’est la vérité.
—    D’accord... Alors dans quel ordre tu classes les choses exactement ? Il y a d’abord l’argent, ensuite moi, ensuite ta vie ? À moins qu’il n’y ait quelque chose avant l’argent ?
—    Écoute, je me rends bien compte que j’ai fait une connerie. Je comprends ton point de vue. Mais si j’avais su que tu me quitterais, jamais je n’aurais... je voulais juste pouvoir prendre soin de toi.
—    Tu l’as déjà dit.
—    Je t’en prie, ne fais pas ça. Je ne le supporte pas... ça fait trop mal ! lâcha-t-il comme si un coup dans le ventre lui avait coupé le souffle.
—    C’est fini, Travis.
—    Ne dis pas ça...
—    Si. C’est terminé. Rentre chez toi.
—    Mais c’est toi, chez moi.
Ses mots me fendirent le cœur, j’eus à mon tour du mal à respirer.
—    Tu as fait ton choix, Travis, et j’ai fait le mien.
—    Je n’irai pas à Vegas, je ne reverrai pas Benny... Je compte finir mes études. Mais j’ai besoin de toi. Vraiment besoin. Tu es ma meilleure amie.
Dans la pénombre, je vis une larme rouler sur sa joue. L’instant d’après, il me tendit les bras et je fus contre lui. Ses lèvres trouvèrent les miennes. Il me serra fort, puis prit mon visage entre ses mains, soudain plus exigeant.
—    Embrasse-moi, murmura-t-il.
Je gardai la bouche et les yeux clos, mais sentis que je me détendais à son contact. Il me fallut toute la volonté du monde pour ne pas répondre à son baiser et dévorer ces lèvres qui m’avaient tant manqué.
—    Embrasse-moi ! supplia-t-il. S’il te plaît, Poulette ! Je lui ai dit non !
Quand je sentis ses larmes chaudes sur mon visage froid, je le repoussai.
Laisse-moi tranquille, Travis !
Je n’avais pas fait deux pas qu’il m'attrapait par le poignet. Je ne me retournai pas. Quand je fus tirée en arrière, je compris qu’il s’était laissé tomber à genoux.
Je t’en supplie, Abby. Ne fais pas ça.
Je finis par faire volte-face. Il me tendait les bras, comme à l’agonie. Mon regard se posa alors sur mon  surnom en lettres épaisses et noires, au creux de son poignet. Je m’en détournai. Il m’avait prouvé ce que j'avais redouté dès le début : il aurait beau m’aimer, chaque fois que l’argent serait de la partie, je ne viendrais qu’en seconde position. Exactement comme avec Mick.
Si je cédais, soit il changerait d’avis au sujet de Benny, soit il m’assommerait de reproches chaque fois que la gêne financière l’empêcherait de mener une vie plus facile. Je l’imaginai ayant un boulot d’ouvrier, rentrant à la maison avec les mêmes yeux que Mick les soirs où il n’avait pas eu de chance. Ce serait ma faute si son existence n’était pas conforme à ses rêves, et je ne pouvais pas laisser les regrets et l’amertume auxquels j’avais tourné le dos compromettre mon avenir.
Laisse-moi, Travis.
De longues secondes s’écoulèrent avant qu’il ne me lâche le bras. Je courus jusqu’à la cafétéria et ouvris la porte sans me retourner. Dans la salle, tous les regards pivotèrent vers moi comme je me dirigeais vers le buffet. Lorsque j’y arrivai, les gens reportèrent leur attention vers l’extérieur. Sur le trottoir Travis était à genoux et ne bougeait pas.